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The Phoenix Rises
31 octobre 2012

Cradle of Filth : The Manticore & Others Horros

 

Manticore and OH13/20

"Une semi déception pour un opus incomplet et fragile, à l’équilibre instable et à la personnalité effacée."

 

Le dévoreur. La manticore est une créature carnassière et féroce, aussi féline que sauvage, esthétique que brutale et surtout d’un sadisme en devenant malsain dans la mythologie. Dévorant ses victimes par plaisir et se délectant de leurs souffrances, la manticore reste aujourd’hui encore l’incarnation de la bestialité animale. Il n’est donc que peu surprenant que Cradle of Filth, habitué aux monstres mythologiques et aux légendes, s’en soit approprié le nom pour l’appellation de son dixième opus studio, vingt ans après ses débuts.

D’une productivité étonnante depuis quelques années, et revitalisés par les réussites que furent "Godpseed on the Devil’s Thunder" et "Darkly, Darkly Venus Aversa", les britanniques en ont même profité pour proposer un ep longue durée agrémenté d’un dvd complet ("Evermore Darkly") et le fameux projet orchestral qu’ils annonçaient depuis des années ("Midnight in the Labyrinth) pas plus tard qu’il y a six mois. Et c’est déjà au tour de "The Manticore and Others Horrors" de voir le jour, soit deux ans tout juste après "Darkly, Darkly Venus Aversa".
Les premières annoncent soufflèrent le doute chez les admirateurs, entre les déclarations de Dani Filth qui annonçait un opus avec des éléments heavy et punk, le départ du bassiste Dave Pybus (remplacé par le parfait inconnu Daniel Firth) et Paul Allender qui déclarait que l’album ne devrait pas ressembler aux très réussis précédents. L’anxiété était légitime, encore plus après la diffusion du sublime clip de "Frost in the Pillow", où l’excellence visuelle ne permettait tout de même pas de cacher la pauvreté du morceau qui rappelait étrangement la période thrashisante de "Nymphetamine" ou "Thornography", pas forcément les meilleures heures de Cradle. Car outre un riff relativement plat, on retrouvait certes une forte ambiance gothique mais surtout un Dani Filth retombant dans ses travers, avec des vocaux plus clairs mais peu convaincants, ceci ne faisant qu’amenuiser l’impact de la composition.

Heureusement, dans son ensemble, "The Manticore and Others Horrors" reste de bonne facture mais tout de même en deçà des dernières réalisations. Il est à noter que c’est Martin Sharoupka (batterie), décidemment de plus en plus impliqué dans le groupe en plus d’être le meilleur batteur depuis Nick Barker, qui est à l’origine de l’intégralité des arrangements orchestraux de l’album. On passera l’introduction de rigueur qu’est "The Unveiling of O" avant de s’attaquer directement à "The Abhorrent", direct et expéditif à souhait pour ouvrir l’album. L’aspect thrash est très présent mais la virtuosité de Martin derrière les futs permet de varier énormément les structures et les passages violents des compositions, tandis que les riffs évoquent fortement "Nymphetamine", dans cet aspect très britannique de sonner en « twin guitar ». Le chant de Dani, bien que fidèle à lui-même, gagne en clarté ce qu’il perd en puissance. On remarque donc une meilleure élocution, mais par la même occasion un vocaliste fatigué de véhiculer une telle violence depuis vingt ans et parfois à la peine sur les parties les plus brutales. L’empreinte gothique des arrangements et du break orchestral est extrêmement bien ficelé, preuve que Martin est un touche à tout qui, on l’espère, gagnera en notoriété avec le temps (il jouera d’ailleurs dans le prochain album de Masterplan).
Ensuite, l’album manquera foncièrement de variété et de grandiloquence dans son contenu, peinant parfois à maintenir l’attention sur l’intégralité de l’album. Il faut également noter l’absence de longues pièces musicales, les titres ne dépassant pas ici les six minutes. "Illicitus", par exemple, se veut très symphonique, rapide et furieuse dans la pure tradition du groupe, et manque donc singulièrement de surprise, malgré une totale maitrise de son sujet. Les chœurs fantomatiques et sporadiques renvoient plutôt à l’atmosphère très théâtrale de "Damnation and a Day".

A l’inverse de ce retour en arrière, la surprise d’un "Huge Onyx Wings Behind Despair" n’en est que plus grande, s’ouvrant sur quelques sons cybernétiques avant de partir sur un rythme frénétique et un riff black metal qu’il fait bon entendre. Les orchestrations sont nerveuses et grandioses, Dani hurle comme un damné et les changements de tempos apportent une dynamique énorme au morceau, repartant de plus belle sur un blast effréné du monstrueux Skaroupka. La voix, ample et déchirée de Dani est complètement à son aise et place cette composition sur un astre ténébreux, faisans amèrement regretté que l’ensemble ne soit pas de ce calibre. Il en va de même pour le surprenant "Siding with the Titans", à la mélodie au piano mais aux riffs vicieux comme Cradle n’en avaient pas livré depuis pas mal de temps, également surplombé par une superbe performance de Dani au micro. La richesse du jeu de batterie y est, une nouvelle fois, pour beaucoup tant on alterne entre plans rapides, multiples roulements de toms et accélérations fiévreuses débouchant sur des blast beats furieusement rapides. Mais ceci alterne avec un "Manticore" plutôt fade (dont le riff initial est une copie conforme de la version longue de "Nymphetamine" à laquelle se greffe des arrangements légèrement orientaux), un "For Your Vulgar Delectation" très (trop) simple et sans surprise (les riffs thrash n’ont jamais été un modèle de variété et de richesse) ou encore un "Succumb to This" dont les aspirations gothiques sont plutôt précaires (le chant féminin n’est pas une grande réussite).

"Pallid Reflection" surprend également dans le sens ou le riff principal se veut très heavy metal, à l’instar d’un "Forgive Me Father" mais sans son impact metallique qui en faisant un hymne. En revanche, on peut sincèrement se poser la question de mettre en bonus track une composition comme "Death, The Great Adventure" (titre plus long que tous les autres de l’album), parcouru d’un souffle épique incontestable et d’une richesse qui manque singulièrement au corps de l’album.
Dans l’ensemble, la déception est de mise puisque Cradle of Filth était sur une excellente dynamique depuis quelques années et que "The Manticore and Others Horrors" marque clairement un coup d’arrêt, une semi déception pour un opus incomplet et fragile, à l’équilibre instable et à la personnalité effacée. Espérons que le groupe ne passera pas par un second passage à vide, comme ce fut le cas après "Midian", et qu’il repartira plus furieux et digne de son rang dès le prochain disque.

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